Nous avons pris connaissance de la démolition imminente de l’ancienne Banque Molson de Bedford par le ministère des Transports afin de permettre l’élargissement de la voie publique. Nous reconnaissons que les enjeux associés à la sécurité ne sont pas à négliger, mais nous souhaitons vous faire part des enjeux associés à notre champ de compétences.
L’ancienne Banque Molson de Bedford, située à l’angle des rues du Pont et Principale, figure à titre de « Bâtiment d’intérêt moyen » dans l’inventaire des bâtiments patrimoniaux de la municipalité. Malgré ce statut, aucune étude patrimoniale n’aurait été effectuée à ce jour sur ce bâtiment. Nous croyons qu’il est essentiel qu’une telle étude soit faite avant de prendre une décision sur son avenir.
Ceci dit, même sans étude patrimoniale, plusieurs éléments nous permettent de reconnaître son intérêt historique et architectural. Son architecte d’origine britannique, Philip John Turner, a reçu sa formation au sein de l’Architectural Association de Londres. Plusieurs années après son arrivée à Montréal, il a occupé la direction de l’École d’architecture de l’Université McGill entre 1939 et 1941. Il aurait construit plus de 15 succursales Molson au Québec et en Ontario.
Certaines des succursales réalisées par ce même architecte ont non seulement trouvé une nouvelle vocation, mais sont également devenues une source de fierté et de succès dans leur milieu. La succursale de Sorel, construite vers 1915, est aujourd’hui utilisée par un cabinet d’assurances. L’édifice a été identifié d’intérêt patrimonial lors d’un récent inventaire du patrimoine bâti et s’est également mérité, en 2008, un prix pour souligner la valorisation du patrimoine bâti.
Du côté de la succursale située à Drummondville, elle est aujourd’hui occupée par Commerce Drummond, un organisme qui a pour mission de soutenir et stimuler la fonction commerciale de la ville. Cet édifice a été cité au niveau municipal en 2005 et continue de contribuer par son usage à l’activité économique du centre-ville de Drummondville.
Les édifices bancaires sont reconnus pour leur facilité de conversion et les exemples sont nombreux. Leur volume et leur distribution répondent aux usages commerciaux, tandis que les hauts plafonds, la qualité de leurs matériaux et les grandes fenêtres en font des intérieurs très convoités. Ceci sans compter le prestige que représente l’occupation d’une ancienne banque en raison de la valorisation sociale de ce type d’usage. De plus, leur emplacement est stratégique : on les retrouve sur la rue la plus importante, souvent implantés à une intersection, les rendant par conséquent très visibles et emblématiques.
Ainsi, tout en reconnaissant les enjeux de sécurité concernant l’aménagement de cette intersection, Action patrimoine considère que la démolition de cet édifice n’est pas la solution appropriée. La démolition n’est assurément pas la seule option envisageable pour améliorer la sécurité de cette intersection. Nous croyons qu’il est possible, par une réflexion élargie, d’améliorer à la fois les enjeux de circulation et de sécurité et d’assurer la mise en valeur de ce bâtiment d’intérêt. Nous espérons que les ministères concernés par ce cas, en matière de transport, mais aussi en matière de culture et de patrimoine, puissent se concerter avant de procéder à une intervention aussi irréversible qu’une démolition.